Depuis plusieurs mois, la région investie de la responsabilité de la carte des formations, porte un projet pour les lycées. Elle a organisé des réunions d’information. Trois ont concerné le Jura, à Lons, Dole et Saint-Claude.
Pour la région, il s’agit d’un plan ambitieux sur 30 ans pour « répondre aux enjeux du lycée de demain » et donner à chaque territoire des outils de formation répondant aux besoins des entreprises et des populations. Un plan pour moderniser les lycées, élever le niveau de qualification quel que soit l’âge, offrir des établissements « ouverts » vers le monde professionnel et l’enseignement supérieur… Le tout, dans un monde soumis à des mouvements rapides, économiques, technologiques… nécessitant la capacité de se former en permanence. La région ne veut « pas seulement investir dans les lycées, mais investir le lycée ». Pour ce plan, elle consacrera plus d’un milliard d’euros et affirme travailler en concertation avec le rectorat.
Mais derrière cette présentation flatteuse, il y a une réalité qui est moins idyllique. Quelle méthode emploie-t-elle ?
Elle martèle vouloir faire des économies sur les dépenses de viabilisation, pour « mieux » investir ailleurs.
Elle dresse un constat de baisse d’effectifs dans les années passées, phénomène accentué dans les établissements de la voie professionnelle.
Elle établit des prévisions pour le futur donnant une quasi stabilité des effectifs élèves en ce qui concerne les 15/24ans, c’est plutôt une bonne nouvelle.
Elle donne un bilan patrimonial, par établissement, des sommes investies depuis 1986 et à investir pour tenir ses objectifs.
À partir de ces chiffres, dans le Jura, la région pointe 3 établissements dits « fragiles ». Lesquels et pourquoi ?
L’EREA et sa centaine d’élèves : toutes les interventions lors de la réunion de Lons-le-Saunier défendent le maintien du site actuel pour l’accueil d’un public spécifique, nécessitant une attention particulière. La région semble l’avoir entendu.
Deux lycées professionnels avec des effectifs faibles et en baisse : les LP Fillod à Saint Amour et le Corbusier à Lons.
Ce constat est fait sans s’interroger sur ses causes. La voie professionnelle a subi de nombreuses attaques depuis des années : suppression de formations et limitation des capacités d’accueil, réforme du Bac pro en 3 ans qui a amputé les effectifs de près de 25 %, suppression des classes de découverte professionnelle, fusion d’établissements. Tout cela a amplifié les baisses d’effectifs. Sur ces points, l’interlocuteur ce n’est plus la région mais le rectorat … qui n’a jamais pris la parole lors de ces réunions !
Pour que le lycée de demain voie le jour, la région n’hésite donc pas à sacrifier les LP. Ainsi a-t-elle annoncé lors de la dernière réunion du comité de pilotage, le 5 juin, la fermeture de trois sites dont celui du LP le Corbusier pour le Jura. Elle ne précise pas dans quels délais précisément, s’il y aura transfert ou fermeture de formations. Les conséquences sont importantes : les PLP se retrouvent en mesure de carte scolaire et dans un contexte de suppressions, peuvent être TZR… Pour les agents, S. Laroche, vice présidente de région, porteuse du projet, se veut rassurante et s’engage à les garder tous dans les meilleures conditions. Que deviendront-ils si en plus de la fermeture des sites, les établissements restants perdent encore des élèves ?
Obsédée par sa volonté de se débarrasser des bâtiments, la région prend la question à l’envers : c’est absurde de définir le « lycée de demain » sans réfléchir d’abord à la carte des formations et à la place de la voie professionnelle sous statut scolaire, pour permettre la réussite de tous les élèves. Plus inquiétant, elle préconise d’autres voies permettant d’accéder à la formation professionnelle (apprentissage, MFR, lycées privés…) et encourage le mixage des publics. Dans ce cadre, comment ne pas croire que le recteur ne profitera pas de ce plan pour massacrer encore l’enseignement professionnel public sous statut scolaire, lui qui avait annoncé à son arrivée qu’il y avait trop de LP, les décime depuis des années avec zèle et déplore qu’il y ait encore trop de lycéens professionnels.
Finalement, les LP déjà fragilisés continuent à faire les frais d’une politique qui n’est guère différente de celle de l’ère Sarkozy. Bien au contraire, elle amplifie la casse des LP.
Pour la FSU du Jura, ce projet est à replacer dans un double contexte. D’une part, la refonte de la carte des collectivités territoriales. D’autre part, la recherche effrénée d’économies dans le cadre du pacte de responsabilité (dont 11 milliards pour les collectivités territoriales). Cela entre en contradiction avec cette volonté affichée de la région d’investir dans les lycées. En l’état, le plan lycées n’est pas acceptable, le CDFD de la FSU du Jura, réuni le 26 mai, s’oppose à sa mise en place.
Pour le SNUEP-FSU, seule une défense globale des lycées professionnels et de la carte de formation peut être efficace. Pour peser, il a relancé l’intersyndicale de l’enseignement professionnel. Il continuera à revendiquer, auprès de la région, du rectorat, une politique ambitieuse pour l’enseignement professionnel laïque, initial et sous statut scolaire.
Le SNUEP-FSU et le SNUACTE-FSU appellent les personnels des LP à se mettre en grève le 27 juin 2014, jour où les élus de la région voteront le plan lycées. Voir l’appel intersyndical.